Oggetto: Parution de ALERTE OTAN N°65 - 2e trimestre 2017
Data: 3 luglio 2017 18:18:32 CEST
Editorial - Bruxelles 2017 : un Sommet OTAN très menaçant pour la paix mondiale
Contre-Sommet Otan :
- L\'Otan, hydre tentaculaire [à lire ci-dessous]
- Montenegro: la neutralité du Montenegro, seule issue durable [à lire ci-dessous]
- Yougoslavie: comment les guerres yougoslaves ont (provisoirement) sauvé l\'Otan [à lire ci-dessous]
- Serbie 1999: bombardements à l\'uranium appauvri
- L\'Ukraine et l\'Otan
Nouvelles violences en Ukraine
Star Wars, de la fiction à la réalité
Hiroshima: en finir avec l\'arme nucléaire
Commémoration Bombardements Hiroshima et Nagasaki
A la Conférence du Contre-Sommet Otan du 25 mai 2017, la première session plénière a entendu une intervention de Nils Andersson intitulée: «L’Otan, hydre tentaculaire». Ci-dessous nous publions l’essentiel de son contenu.
A quoi sert l’OTAN ? Une organisation militaire sert à faire la guerre. De cette évidence découlent deux
interrogations, la guerre pour qui et la guerre contre qui ? L’OTAN a été fondée il y a soixante-huit ans comme dispositif militaire pour, dans la confrontation entre deux systèmes économiques et sociaux irréductiblement opposés, le capitalisme et le socialisme, défendre les intérêts idéologiques, politiques et économiques du monde occidental.
La signature du Traité de l’Atlantique Nord a été un acte majeur de la guerre froide, avec un double objectif, légitimer la présence de bases étatsuniennes en Europe et constituer une coalition armée du camp occidental contre l’Union soviétique qui y répondra par la formation du Pacte de Varsovie. Ce fut
le rôle de l’OTAN jusqu’à la chute du Mur en 1989, avec des moments de fortes tensions, sans jamais que l’Alliance atlantique ait à tirer un coup de canon.
L’implosion du bloc soviétique va mettre en question la raison d’être de l’OTAN, mais son secrétaire général, Manfred Wörner, fait clairement entendre qu’il n’en est rien : « Seule l’Alliance atlantique peut lier les Etats-Unis et le Canada à l’Europe, elle seule peut assurer que le changement s’instaurera sans crainte de revers ou de volte-face. Elle seule peut coordonner la stratégie globale de l’Occident pour la paix et la garantie des valeurs démocratiques dans une Europe nouvelle. Elle seule peut ancrer à l’Ouest une Allemagne unie dans des conditions de sécurité maximales pour ce pays et pour ses voisins.(17 mai 1990) ».
L’OTAN est le pilier qui lie les atlantistes européens derrière la bannière étoilée, pour George Bush père, elle est une pièce maitresse des plans hégémonistes des États-Unis dans le Nouvel Ordre Mondial, les uns et les autres s’emploient à défendre son maintien. C’est chose faite en 1991, la « permanente validité » de l’Alliance atlantique est affirmée dans la Déclaration de Rome et un « nouveau concept stratégique » est adopté, selon lequel l’OTAN, présentée jusqu’ici comme une « alliance exclusivement défensive », devient une force interventionniste. Mission lui est donnée d’assurer sur le continent la stabilité du Nouvel Ordre Mondial par l’intégration militaire de sa partie orientale et, alléguant les carences des États européens, en intervenant dans les Balkans.
La guerre dans les Balkans, va servir à justifier la pérennisation de l’OTAN. Le 28 février 1994, l’aviation
états-unienne intervenant dans le cadre de l’OTAN, abat des bombardiers bosno-serbes, la Bosnie est la
première guerre chaude de l’OTAN. Au Kosovo stratégie géopolitique et mission idéologique conjuguées, avec la résolution 1244 on entre dans l’illégalité en violant la Charte des Nations Unies, passant outre le rôle du Conseil de sécurité et du fantomatique Comité d’État-major de l’ONU de « fixer les effectifs, le degré de préparation des forces et leur emplacement général », l’OTAN est seule aux commandes. Cette instrumentalisation de la Charte ouvre la voie aux guerres à venir.
Dès la dissolution du bloc soviétique, la politique de partenariats va être un mécanisme essentiel d’élargissement de la pieuvre otanienne. En 1991, est constitué, le Conseil de coopération euroatlantique (devenu le Conseil de partenariat euroatlantique) qui, symbolisant la victoire politique et idéologique des atlantistes va réunir les vingt-deux États membres de l’OTAN, la Russie, les États de l’ancien Pacte de Varsovie, les onze États de la Communauté des États indépendants et l’Albanie. Ce partenariat va être adoubé en 1994 d’un Partenariat pour la paix intégrant également les États européens non membres de l’OTAN, avec pour objectif, de « se doter de forces plus en mesure d’opérer avec celles des membres de l’OTAN ». En 1994 également est lancé le Dialogue méditerranéen avec la Mauritanie, le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, l’Égypte, la Jordanie, et… Israël, qui élargit les partenariats de l’OTAN à l’Afrique du Nord et
au Proche-Orient.
Parallèlement, l’OTAN modèle l’Europe en réorganisant le dispositif de défense et en normalisant les équipements militaires des pays ayant appartenu au Pacte de Varsovie et à partir de 1999, bafouant les engagements pris lors de la réunification allemande dans le Traité 2 + 4, l’OTAN, précédant leur adhésion à l’Union européenne, intègre successivement ces pays et étend sa toile en Europe centrale,
orientale et balkanique vers les frontières de la Russie.
Avec le « concept stratégique pour le XXIe siècle » adopté lors du Sommet du cinquantenaire à Washington en 1999, qui fixe comme objectif de « sauvegarder, par des moyens politiques et militaires, la liberté et la sécurité » de l’Amérique du Nord et de l’Europe, on entre dans sa phase de globalisation, il est décidé que « les forces de l’Alliance peuvent être appelées à opérer au-delà des frontières de la zone euro atlantique. »
Jusqu’ici organisme de « défense régionale », l’OTAN devient le bras armé de la mondialisation néolibérale. Avec le concept stratégique pour le XXIe siècle, on entre dans le cycle de la guerre permanente de Georg Bush junior et de son administration. Les interventions de l’OTAN ou de coalitions occidentales, avec un mandat du Conseil de sécurité de l’ONU, en Irak, Afghanistan et Libye, sous couvert du « droit d’ingérence humanitaire », puis du « devoir de protéger » vont être cause de chaos et abominations.
L’objectif d’une OTAN planétaire est de « chercher à établir de plus en plus de partenariats mondiaux avec des pays de même sensibilité » ; ainsi, est lancée en 2004, l’Initiative de Coopération d’Istanbul avec le Bahreïn, les Émirats arabes unis, le Koweït et le Qatar puis, dans le cadre du Global Nato, sont conclues des « activités en coopération », avec l’Irak, l’Inde, le Pakistan, l’Afghanistan, la Mongolie, la Corée du Sud, le Japon, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et la Colombie.
Pour que l’OTAN soit en mesure de se projeter tous azimuts, en 2006, lors du sommet de Riga, il est décidé de la doter d’une capacité de mener simultanément deux opérations de grande envergure, requérant 60 000 hommes chacune, et six opérations moyennes de 30 000 hommes, soit une projection opérationnelle de 300 000 hommes !
En 2007, Daniel Fried, Secrétaire d’État adjoint étatsunien peut déclarer : « Depuis la guerre froide et son rôle régional dans les années 1990, l’OTAN s’est transformée en une organisation transatlantique effectuant des missions globales, de portée globale avec des partenaires globaux. Tout appartient potentiellement à la zone de l’OTAN ».
Si les objectifs de l’OTAN sont pérennes, le cours de l’Histoire ne l’est pas, la crise économique et financière entrave une projection mondialisée de l’OTAN, la Force de réaction rapide de l’OTAN de 300 000 hommes restera, avis d’experts : « une Rolls-Royce qui n’est jamais sortie du garage ». Bien qu’il ne soit pas un État dans le monde doté d’une puissance de feu et d’une capacité de déploiement plus grandes que les États-Unis, bien qu’il n’a pas existé dans l’Histoire une coalition disposant de moyens militaires et logistiques équivalents à ceux de l’OTAN, les puissances atlantistes n’ont gagné aucune des guerres asymétriques engagées depuis quinze ans et ont connu des échecs militaires en Irak et en Afghanistan, la Libye est une zone de non-droit, les Balkans sont instables, s’ajoute l’effrayant engrenage syrien et les lieux de conflits ouverts ou potentiels s’étendent sur un arc allant des Philippines au Nigéria. L’euphorie des années 1990 et du tournant du XXIe siècle n’a plus cours.
Réalités géopolitiques, échecs militaires sur le terrain et crise financière, l’OTAN a réduit ses interventions hors zones. En février 2011, seulement en Afghanistan, 132 000 soldats étaient engagés dans la FIAS, en novembre 2016, ils ne sont que 18 000 à être déployés dans des missions de l’OTAN. Si elle fournit toujours des appuis logistiques, de formation et des financements (comme l’a confirmé le récent Sommet de Bruxelles s’agissant de l’engagement de l’OTAN contre l’Etat islamique), l’OTAN n’est plus aux commandes d’opérations majeures hors sa zone historique. Un autre fait va modifier le rôle de l’OTAN: en 2015, la Chine, considérée par Washington comme la menace principale à moyen terme, la nouvelle stratégie du Pentagone est de « concentrer sa présence, son pouvoir de projection et sa force de dissuasion en Asie-Pacifique ».
La vision d’une OTAN globale se trouve modifiée par le transfert du centre de gravité de défense des Etats-Unis vers l’Asie orientale et le Pacifique et les plans de créer une « OTAN » sud-est asiatique. La zone euro atlantique n’étant plus, pour les États-Unis, l’épicentre de sa stratégie, globale, s’ensuit la demande aux États européens d’Obama puis de Trump, d’apporter une contribution financière
plus importante à la défense du continent et de sa périphérie, les fameux 2 % du PIB en dépenses militaires.
Cela étant, pour le Pentagone, l’OTAN et l’Europe sont un rouage essentiel de son dispositif stratégique global. Une Europe sous commandement du Pentagone, le commandant des Forces des États-Unis en Europe (l’EUCOM) étant automatiquement le commandant suprême de l’OTAN. Une Europe incluse dans le système global de défense des États-Unis avec des bases militaires en Allemagne, Grande-Bretagne, Italie, Espagne et dans sept autres pays européens, ce à quoi s’ajoute la VIe flotte US en Méditerranée. Une Europe intégrée dans le système mondial d’écoutes et d’espionnage politique, économique, militaire du réseau Echelon avec en Grande-Bretagne le plus important centre d’écoutes dans le monde de la NSA. Une Europe englobée dans le dispositif du bouclier antimissile ABM avec la base opérationnelle de Deveselu en Roumanie, une base en installation en Pologne et quatre destroyers dotés de capacités antimissiles basés en Espagne. Une Europe engagée dans la guerre des drones, la base de Ramstein, en Allemagne servant de station relais à la base de Creech, au Nevada.
Le repli d’une OTAN globale sur sa zone historique euroatlantique ne modifie en rien sa raison d’être.
L’Europe répond toujours à la projection du géographe Mackinder, qui fonde la stratégie de Brzezinski : « qui domine l’Eurasie domine le monde ». La Russie est une pièce maitresse de cet enjeu, y compris pour l’endiguement de la Chine. D’où la politique interventionniste et d’extension de l’OTAN sur le continent dans ce qui est considéré par la Russie comme son « espace vital », ce qui a créé une situation de guerre en Ukraine.
Dans le cadre de l’opération Atlantic Resolve pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale des manoeuvres de grande envergure (25 000 hommes et plus) se sont déroulées dans la partie orientale de l’Europe et au terme de ces manoeuvres plus d’une centaine de blindés US ont paradé sur 1 800 km, des Pays baltes à la Bavière. En janvier 2017 sont arrivés des États-Unis, 3 500 soldats, 87 tanks, 18 canons automoteurs, 419 voitures tout terrain, plus de 2 000 autres véhicules militaires, déployés dans les pays baltes, en Pologne, Hongrie, Roumanie et Bulgarie.
Pour assurer une présence avancée et adapter l’OTAN « aux défis et aux menaces se développant » à sa périphérie il a été décidé lors du sommet de Cardiff en 2014, le triplement des effectifs de la NRF (Force de réaction rapide), la création d’une force opérationnelle interarmées à très haut niveau de préparation et le renforcement des forces navales permanentes. Pour permettre une plus grande réactivité au déploiement de ces forces spéciales, il a été mis en place huit Quartiers généraux dénommés Unité d’intégration des forces de l’OTAN (NFIU), basés en Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Roumanie, Bulgarie, Hongrie et Slovaquie. Les pays occidentaux disent craindre la Russie, la Russie se sent agressée par l’Occident, il faut rompre cet engrenage funeste dans lequel l’OTAN joue un rôle belliciste.
Succédant au Général Breedlove qui s’est singularisé par des déclarations considérées comme outrancières même au sein de l’OTAN, le général Curtis Scaparrotti est devenu le nouveau Commandant suprême de l’OTAN (SACEUR). Lors de sa prise de fonction, il a précisé que le « théâtre européen est essentiel pour les intérêts de l’Amérique et que l’OTAN reste la clé de la sécurité
nationale pour les États-Unis » et ses déclarations ne sont pas moins martiales que celles de son prédécesseur quand il déclare :
« À l’est, une Russie renaissante est passée d’un partenaire à un protagoniste qui cherche à saper l’ordre international et à se réaffirmer en tant que puissance mondiale » et de poursuivre « pour lutter contre les menaces auxquelles nous sommes confrontés. […] nous retournons à notre rôle historique en tant que commandement de guerre ».
(zone militaire, 4 mai 2017)
La guerre pour qui, la guerre contre qui ? Si on est passé d’un discours hégémonique à un discours de défense de l’Occident, cela ne change ni son rôle ni sa nature. L’OTAN doit être dénoncée et combattue comme un acteur essentiel de vingt-cinq ans de guerres dites « justes », qui sont la cause de pays ravagés, de peuples meurtris, de la plus grande crise migratoire depuis la Seconde Guerre mondiale, de fanatismes exacerbés et mortifères.
Il faut dénoncer et combattre l’idéologie atlantiste fondée sur le leadership des États-Unis, la domination des puissances occidentales et la soumission du monde à l’économie de marché, il faut dénoncer et combattre la militarisation des pays de l’OTAN et de ses alliés, une logique de guerres dont les peuples sont toujours les principales victimes, il faut dénoncer et combattre l’engrenage militaire et la politique de tension dans la partie orientale de l’Europe et faire prévaloir la négociation. Il faut se libérer de l’allégeance à l’OTAN, hydre tentaculaire et il faut encore et toujours lutter pour sa dissolution.
Nils Andersson, 25 mai 2017
La neutralité du Monténégro est la seule issue durable
Parler du petit Monténégro peut sembler inintéressant dans un contexte géopolitique global. Cela peut sembler prétentieux. Mais ce ne l\'est pas. Le Monténégro est tout à la fois un repère, un signe, un message. Notre cas comporte des leçons spécifiques de grande importance.
Il révèle la véritable nature de l\'Alliance Atlantique, mieux que tout autre exemple dans l\'histoire moderne de l\'Otan, excepté bien sûr les bombardements et les agressions de l\'Otan partout dans le monde.
Le Monténégro est confronté à une question historique, sans avoir la possibilité d\'y répondre! Les autorités du pays, contre la volonté d\'un nombre écrasant de citoyens et craignant celle-ci, ont décidé récemment de faire ratifier par le parlement un accord pour adhérer à l\'Otan. Ce parlement est illégitime, il résulte d\'élections frauduleuses, il a été établi suite à un \"coup d\'état\" mis en scène. C\'est un épilogue inédit après trois décennies de pouvoir.
La ratification du protocole d\'entrée du Monténégro à l\'Otan, soutenue par un Parlement tronqué, par des institutions et des structures politiques criminelles, qui ne protègent que des intérêts personnels et des propriétés acquises illégalement, n\'est rien d\'autre qu\'une agression politique légale de l\'Otan – ou de pays complices – contre le petit Monténégro.
Le Monténégro a souffert d\'un double impact. L\'impact extérieur vient de l\'Alliance atlantique, qui nous a envoyé en 2015 une invitation à adhérer. L\'autre impact provient de l\'intérieur, des 30 ans d\'imposition du régime de Milo Djukanovic et de sa clique mafieuse criminelle. Nous sommes entre le fer et l\'enclume, entre deux forces non démocratiques et criminelles. La première est globalement représentée par Washington, la seconde provient de Podgorica. La pression est immense.
A qui l’OTAN a-t-elle envoyé son invitation, et qui sont ses partenaires au Monténégro ? Le gouvernement monténégrin fonctionne comme une mafia moderne. C\'est un système mafieux qui, pour préserver le pouvoir et les privilèges d\'un petit groupe de gens autour de Milo Djukanovic, qui a déjà été 7 fois Premier ministre, utilise les institutions comme une façade. Il s’agit donc d’une démocratie de façade qui, avec le temps, est devenue une dictature ouverture, comme on l\'a vu en octobre dernier quand, le jour même des élections, Djukanovic, craignant le changement et une révolte citoyenne, a monté un pseudo coup d’Etat.
Derrière cette façade, se cache le crime organisé. Il y a des élections, mais elles sont truquées. Il y a des institutions, mais elles sont privatisées. Il y a la liberté d\'expression, mais si vous critiquez le Premier ministre et ses petits amis, vous restez sans boulot, vous subissez des menaces, vous mettez en danger votre sécurité et celle de votre famille, vous pouvez être blessé ou même tué, vous pouvez être jeté en prison. C\'est ce qui m\'est d\'ailleurs arrivé juste avant de venir ici.
Un exemple illustre ce qu\'est le premier homme de ce petit pays : Djukanovic a été caractérisé par la Justice italienne comme \"un dangereux criminel international\", dont le nom se trouve parmi 15 suspects d\'association mafieuse et dont le cas n\'a pas été classé.
Je cite cet exemple, non seulement pour dénoncer le gouvernement monténégrin et son homme fort, mais pour montrer avec qui l\'Otan veut s\'allier. Il est curieux qu\'un tel individu soit le principal protagoniste de l\'intégration à l’Otan. Y aurait-il une erreur quelque part ? Si l\'Otan est réellement ce qu\'elle prétend être – c.à.d. une organisation démocratique, qui chérit les vraies valeurs de la démocratie – comment peut-elle soutenir un tel dirigeant ?
Tout ceci ne dérange pas les partenaires de l’Otan de Djukanovic. Au contraire : il y a quelques années, un haut diplomate des Etats-Unis, Philip Reeker, alors adjoint du vice-Secrétaire d’Etat, a dit à propos de Djukanovic: \"je le connais très bien. Je l\'ai rencontré de nombreuses fois, je le considère comme un ami parce qu\'il comprend bien toute cette région. Il pense stratégiquement… Et, comme je l’ai dit à Djukanovic et à ses ministres, nous avons hâte de poursuivre notre étroite coopération\".
Ce n\'est pas un hasard. L\'Otan n\'est pas intéressée par l’Etat de droit ou des choses comme ça. La seule chose qui l\'intéresse, c\'est la géopolitique et la défense des intérêts occidentaux, menés par Washington, par l\'oligarchie militaro-financière des multinationales. Ce qui est important pour l\'Otan, c\'est la loyauté et l\'obéissance. Ils ont peur, plus que tout, de ce que Noam Chomsky a appelé \"la désobéissance réussie\". Autrement dit, ils ont peur de la souveraineté.
Le Monténégro de Djukanovic est un bastion antirusse, une zone de propagande et d\'hystérie, et c\'est à ce moment que le gouvernement criminogène introduit la demande pour devenir membre de l\'Otan, contre la volonté du peuple.
Une question se pose: Pourquoi le Monténégro est-il important pour l\'Otan ? Ils le disent ouvertement : c\'est pour compléter le puzzle, pour compléter la militarisation des Balkans. Le Monténégro représente la dernière étape pour atteindre la Serbie, qui pourrait ainsi terminer la militarisation et l\'intégration totale des Balkans dans l\'Otan. La Croatie et l\'Albanie en sont déjà membres, ainsi que la Slovénie. La Bosnie-Herzégovine, ainsi que le Kosovo, sont sous protectorat. Pour le moment le Monténégro est antiserbe, mais il est aussi utilisé comme pion contre la Russie. Tel est le modus operandi. Taiwan est antichinois, l\'Ukraine est antirusse, la Biélorussie semble également devenir antirusse.
L\'agenda est clair: ils suscitent des divisions nationales, soutiennent des régimes antidémocratiques qui leur servent de marionnettes et transforment les pays en républiques bananières. Ces pays ne sont plus souverains, ils sont colonisés par le néo-libéralisme au moyen de la dérégulation, la désindustrialisation et la privatisation totale. Cela plonge ces pays dans la pauvreté et accroît les moyens de les contrôler.
Les pays membres - et non-membres - de l\'Otan doivent comprendre que, en forçant le Monténégro par des malversations à intégrer l\'Otan, cela ne peut que le déstabiliser, encore plus qu\'il ne l\'est déjà maintenant. Cette méthode d\'élargissement de l\'Otan se situe en dehors de la sphère politique et légale et représente une manipulation des institutions et une agression du Monténégro.
La neutralité du Monténégro est la seule issue durable, celle qui peut garantir une stabilité à long terme, la prospérité et la paix. Cela vaut pour les Balkans dans leur ensemble. La neutralité est une valeur pour laquelle nous devons nous battre. Comme le dit Damir Niksic, un intellectuel de Sarajevo, nous devons nous battre pour elle comme on se bat pour la forêt vierge d\'Amazonie. Se battre pour la neutralité et contre l\'Alliance atlantique est une question existentielle. Etre ou ne pas être, voilà la question pour le Monténégro, pour les Balkans et bien au-delà.
Marko Milacic
Comment les guerres yougoslaves ont (provisoirement) sauvé l\'Otan
En effet, au début des années \'90, après la dissolution du Pacte de Varsovie et puis de l\'URSS, nombreux étaient les analystes et même les hommes politiques les plus \"main stream\" à considérer, comme M. Trump avant son élection, que l\'Otan était une \"organisation obsolète\". Mais l\'Alliance Atlantique a trouvé une nouvelle raison d\'être en s\'immisçant dans les guerres de l\'ex-Yougoslavie, d\'abord à la demande de l\'ONU, puis en s\'affranchissant progressivement du Conseil de sécurité et des préceptes de base de sa Charte.
Au départ chargée de surveiller l\'embargo sur les armes et la \"No fly zone\" décrétée sur le ciel de la Bosnie-Herzégovine (1992), l\'Otan s\'est imposée comme un belligérant dans les conflits yougoslaves: première opération de guerre de son histoire en février 1994, première campagne de bombardement en septembre 1995, première occupation d\'un territoire à partir de décembre 1995, la guerre de Bosnie a été celle de toutes les \"premières\" pour l\'Otan. Ce n\'était qu\'un début, car son rôle de pompier-pyromane allait culminer en 1999 avec près de trois mois de bombardement massif de la Serbie, y compris sa province du Kosovo, sous prétexte de sauver sa population albanaise.
En pleine guerre, le sommet de l\'OTAN d\'avril 1999 à Washington, non seulement manifestait son élargissement en direction de la Russie, mais officialisait son changement de doctrine, de la défense de ses membres contre l\'URSS à un rôle de gendarme du monde ignorant les frontières et le droit international.
Georges Berghezan
Autres textes de Georges Berghezan sur le site du CSO
\n