Voyage d'inspection citoyenne au Kosovo

( Vous pouvez suivre l'ensemble du Journal de voyage sur le site du
Commité de Surveillance OTAN à l'adresse:
http://www.csotan.org/Kosovo2004/ )

1. Voyage d'inspection citoyenne au Kosovo:
- 3e jour (15 août 2004)
- 4e jour (16 août 2004)
- 5e et 6e jour (17 et 18 août 2004)

2. Kosovo : L'OTAN et l'ONU incapables de protéger les minorités (Terre
d'Escale)

( SOURCE: alerte_otan -
http://fr.groups.yahoo.com/group/alerte_otan/messages )


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Voyage d'inspection citoyenne au Kosovo


3e jour : 15 août

Nous passons la matinée au monastère de Banja, au nord de Mitrovica, au
milieu d'une foule de milliers de Serbes venus pour assister à la
cérémonie marquant le retour, après quelques siècles d'absence, de
moines en ce lieu venant d'être reconstruit. Sont présents, outre une
foule considérable par rapport au nombre de Serbes vivant dans la
région, à peu près tous les leaders serbes du Kosovo, ainsi que le
gratin de l'église orthodoxe serbe, dont le patriarche Pavle.

En début d'après-midi, nous nous rendons sous escorte de la police de
l'ONU, dans ce qui reste de la mahala rom de Mitrovica, située sur la
rive sud de l' Ibar, la rivière divisant la ville entre secteurs serbe
et albanais. L'escorte est justifiée par la présence parmi nous d'un
Rom ayant passe la plus grande partie de sa vie dans ce quartier. Avant
sa destruction totale lors de l'arrive des forces de l'OTAN et des
extrémistes de l'UCK, la mahala comptait 7.000 habitant et était le
plus grand quartier rom du Kosovo. Alors que nous venons d'entamer la
visite, deux voitures bloquent la ruelle par laquelle nos véhicules et
ceux de la police avaient accède a la mahala. Quelque peu paniques, les
policiers appellent des renforts qui font dégager les véhicules
indésirables. Mais la visite de la mahala est courte et nous rentrons
au quartier nord de la ville.

A l'occasion d'une nouvelle visite (a pied et sans escorte) dans le sud
de Mitrovica, nous avons encore le temps de jeter un oeil a église
orthodoxe incendie en mars - et de la photographier malgré la tentative
de soldats marocains de la KFOR (force internationale sous commandement
OTAN) de nous en empêcher.

Nous partons ensuite dans la région de Pristina et trouvons un logement
dans le petit village serbe de Laplje Selo, a quelques Km de Gracanica,
petite ville peuplée de Serbes et de Roms et ou se trouve, depuis 1999,
le siège de église orthodoxe du Kosovo.


4e jour: 16 août

Les États-Unis et le crime organisé

Apres une brève rencontre avec le leader serbe Momcilo Trajkovic à
Laplje Selo, nous partons à Pristina pour notre rendez-vous avec
l'ombudsman (médiateur) du Kosovo, le Polonais Marek Nowicki.

Chargé de surveiller les problèmes dans le domaine des droits humains,
il dresse un tableau sans complaisance de la situation au Kosovo et des
grandes responsabilités de la communauté internationale. S il s'occupe
également de problèmes internes à la communauté albanaise (comme la
construction pratiquement toujours illégale de nouveaux immeubles
partout au Kosovo), l'essentiel de l'entretien est consacre au sort des
minorités. Selon lui, le manque de clarté sur le statut final du Kosovo
(indépendance, autonomie ?) aggrave les tensions pesant sur toutes les
communautés et contribue à la situation économique catastrophique de la
province. Il nous déclare que le vrai pouvoir ici est partage entre les
Etats-Unis et le crime organise, et accessoirement par l'Allemagne. Il
nous livre plusieurs exemples illustrant l'intolérance extrême de
nombreux Albanais envers les Serbes, comme ce garçon serbe blesse par
balles dans le village de Gorazdevac, puis décédé à son arrivée à
l'hôpital parce que le véhicule l'y transportant, conduit par son père,
a été bloqué pendant de précieuses minutes par une foule s'apprêtant à
lyncher le père et le fils agonisant. Si la police de l'ONU est arrivée
juste à temps pour empêcher le lynchage, il était trop tard pour sauver
le fils. Il considère que son principal succès, en 4 ans de travail au
Kosovo, est d'avoir gagne la confiance de toutes les communautés. Et
surtout, il implore les gouvernements occidentaux de ne pas expulser
les réfugiés du Kosovo appartenant à des minorités, une pratique à
laquelle ont fréquemment recours les autorités allemandes, envers les
Roms principalement.

L après-midi, après avoir vu l'église orthodoxe de Pristina, détruite
en mars dernier, nous visitons plusieurs localités touchées par les
émeutes de mars, en particulier les villes de Kosovo Polje et de
Lipljan. Le niveau de destruction est impressionnant et la situation
des derniers Serbes qui y sont présents est particulièrement tragique,
confinés dans quelques immeubles ayant échappé à la destruction.
Autrefois majoritaires dans les deux villes, les Serbes ne sont
maintenant plus que quelques dizaines de familles à y subsister. Des
maisons sont en cours de reconstruction (par des ouvriers albanais),
mais il est à craindre, comme cela est arrive plusieurs fois ces
dernières semaines, qu'elles seront incendiées des qu elles seront
achevées.

En début de soirée, nous rendons une autre visite particulièrement
éprouvante à la petite mahala rom de Gracanica. Si les Roms disent
n'avoir aucun problème avec leurs voisins serbes (nous avons vu les
enfants des uns et des autres jouer ensemble), leur misère dépasse
l'entendement. Vivant à plusieurs par pièce, les fenêtres de leurs
maisons sont brisées et les toits perces. Parmi eux se trouvent de
nombreux réfugiés de Pristina. Les plus mal lotis sont plusieurs
personnes âgées et des enfants, gravement malades, mais incapables de
payer les soins médicaux. Ils nous disent que, depuis 5 ans, notre
délégation est la 1ere à les visiter et à s'intéresser à leur sort. Si
l'un ou l'autre a un job auprès de l'ONU, la plupart survivent grâce à
la mendicité ou, pour les plus ages, grâce à une maigre pension payée
par Belgrade.


5e et 6e jour

17 août 2004

A la rencontre des Croates et des Roms

Nous visitons Janjevo, dernière localité peuple de Croates au Kosovo.

Isolée au pied de hautes montagnes, cette petite ville compte une
majorité albanaise, mais y vivraient également diverses minorités
musulmanes comme des Turcs, des Gorans et des Roms. La langue
serbo-croate y est parlée librement, mais seules des inscriptions en
albanais sont visibles de la rue. En l'absence de leur prêtre, le
contact avec les Croates est difficile. Ils ne semblent se plaindre que
de la situation économique, et du manque de travail en particulier. Ils
ne sont plus que 200 ou 300 et leur lent exode vers la Croatie, entamé
il y a de nombreuses années, semble se poursuivre aujourd'hui.

Revenus à Gracanica, nous quittons l'enclave serbe pour nous rendre
dans la ville de Gnjilane, au nord-est du Kosovo. Nous sommes reçus par
des habitants roms qui nous fournissent un logement. S"ils ont de bons
contacts avec leurs voisins albanais, ils n'osent pas s exprimer dans
leur langue dans le reste de la ville. En mars, alors que la police et
la KFOR étaient aux abonnés absents, ce sont ces voisins qui les ont
sauvés de la foule albanaise qui voulait brûler leurs maisons. Mais
leur exode, entamé en 1999, se poursuit : la maison où nous devions
loger vient d'être vendue et ses anciens propriétaires, un couple de
personnes âgées, devrait définitivement quitter le Kosovo le mois
prochain.


18 août 2004

La KFOR nous photographie et nous empeche de photographier

A Gnjilane, nous rencontrons des représentants de la communauté rom de
Gnjilane. Les Roms y sont maintenant moins de 400, alors qu'ils étaient
6.000 avant la guerre. Ils parlent de l'"épidémie de haine" qui s'est
emparée du Kosovo depuis les bombardements de l'OTAN. Jusqu'à ce
moment, aucune violence à caractère inter-ethnique n'avait eu lieu et
les diverses communautés (rom, serbe et albanaise) vivaient en bonne
entente. Après les expulsions massives qui avaient marqué l'arrivée des
soldats de l'OTAN en 1999, la situation s'était quelque peu stabilisée
et quelques dizaines de Roms étaient revenus. Les événements de mars
ont particulièrement traumatisé la communauté, sauvée de justesse grâce
à l'intervention de ses voisins albanais. Peu de Roms pensent rester à
Gnjilane, la plupart essayant de vendre leur maison. Alors qu'on nous
raconte divers cas de violences et de meurtres à l'encontre de Serbes
et de Roms, une femme nous déclare : "La question n'est pas de savoir
si nous partirons, mais quand".

Apres la visite d'un quartier rom brûlé en 1999 par les extrémistes
albanais, nous nous rendons ensuite dans le village de Silovo, un des
principaux villages serbes de la région de Gnjilane. Nous sommes reçus
par le personnel et les responsables de la télévision locale, seul
media en serbe accessible (quand il n'y a pas de coupure d'électricité)
à quelques milliers de Serbes vivant autour de Gnjilane. Dépendante
financièrement de publicités de commerçants et surtout d'un contrat
avec la KFOR, qui diffuse une émission hebdomadaire à destination de la
population serbe, l'avenir de la station est précaire. Nous visitons
ensuite l'école du village, ou vivent une cinquantaine de Serbes
expulsés de Gnjilane en mars dernier. Seules 3 ou 4 maisons seraient
encore occupées par des Serbes à Gnjilane.

L'après-midi, nous partons pour Dragas, dans l'extrême sud du Kosovo.
Nous passons par Camp Bondsteel, la plus grande base américaine des
Balkans, et par l'enclave serbe de Strpce, située dans les montagnes
Sar, les plus hautes montagnes de toute l'ex-Yougoslavie. En quittant
l'enclave, une partie de l'équipe est arrêtée par des soldats allemands
de la KFOR, interrogée et photographiée en cachette. Finalement, après
quelques échanges peu courtois, les Allemands daignent autoriser la
poursuite du voyage. Un peu plus loin, quelques kilomètres avant
Prizren, nous passons par les ruines du monastère serbe des Saints
Archanges, détruit en mars par les extrémistes albanais. Alors que le
monastère n'était pas surveillé auparavant, il est gardé par la KFOR
depuis sa destruction. Les soldats allemands en faction semblent
surtout préoccupés à empêcher toute photo des ruines...

Nous arrivons en début de soirée à Dragas, petite ville près des
frontières de l'Albanie et de la Macédoine et peuplée maintenant par
une majorité d'Albanais. Mais il s'agit du centre urbain de la
communauté Goran, des Slaves de religion musulmane, parlant une langue
proche du macédonien et du serbe. La plupart d'entre eux veulent être
scolarisés en langue serbe et ont connu de gros problèmes ces dernières
années, mais la situation semble s'améliorer progressivement.


Vous pouvez suivre l'ensemble du Journal de voyage sur le site du
Commité de Surveillance OTAN à l'adresse
http://www.csotan.org/Kosovo2004/


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http://www.terredescale.net/article.php3?id_article=324

Kosovo : L'OTAN et l'ONU incapables de protéger les minorités

Par Terre d'Escale.
Publié le 18 août 2004.

La Force de Paix au Kosovo placée sous le commandement de l'OTAN ainsi
que la police internationale de l'ONU ont lamentablement failli à leur
mission de protection des minorités lors des émeutes généralisées qui
ont éclaté en mars dernier au Kosovo. C'est ce que constate Human
Rights Watch aujourd'hui dans le premier rapport circonstancié sur les
violences. La protection des communautés minoritaires sera un défi
majeur pour le nouvel administrateur de l'ONU pour le Kosovo, Soren
Jessen-Petersen, qui doit entrer en fonction le 3 août.

Le rapport de 66 pages, intitulé "Failure to Protect : Anti-Minority
Violence in Kosovo, March 2004," décrit les attaques généralisées
menées au Kosovo les 17 et 18 mars contre les Serbes, les Roms, les
Ashkalis (Roms albanophones) et d'autres minorités. Human Rights Watch
explique en détail l'effondrement presque total des institutions de
sécurité du Kosovo lors de la crise-la Force de Paix au Kososo (KFOR)
placée sous le commandement de l'OTAN, la police civile internationale
de la Mission d'administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo
(MINUK) et le Service de police du Kosovo recruté sur place (KPS). Sur
base de nombreux entretiens avec des victimes appartenant aux minorités
et avec des responsables de la sécurité, le rapport fournit maints
détails-jusqu'alors non disponibles-sur ce qui est arrivé à des
dizaines de communautés lors des émeutes.

"Pour l'OTAN et les Nations Unies au Kosovo, il s'agissait du plus
grand test sur le plan de la sécurité depuis 1999, lorsque les
minorités avaient été chassées de chez elles sous le regard passif de
la communauté internationale," a déclaré Rachel Denber, directrice
exécutive par intérim à la Division Europe et Asie Centrale de Human
Rights Watch. "Mais ils ont raté le test. Dans bien trop de cas, les
soldats de la paix de l'OTAN ont cadenassé les grilles de leurs bases
et ont regardé brûler les maisons des Serbes." Le 17 mars, 33
émeutes au minimum ont éclaté au Kosovo sur une période de 48 heures,
et selon les estimations, elles auraient impliqué 51.000
protestataires. Dix-neuf personnes ont perdu la vie au cours des
violences. Au moins 550 maisons et 27 églises et monastères orthodoxes
ont été incendiés et environ 4.100 personnes des communautés
minoritaires ont été déplacées de chez elles.

Les recherches de Human Rights Watch ont établi que les groupes
ethniques albanais ont agi avec une impitoyable efficacité,
débarrassant bon nombre de zones du Kosovo de tous les vestiges d'une
présence serbe. Ils ont également visé d'autres communautés
minoritaires, notamment les Roms et les Ashkalis. Dans un grand nombre
de villages touchés par les violences, absolument toutes les
habitations serbes, roms ou ashkalis ont été détruites lors des
attaques, que celles-ci soient spontanées ou organisées.

Dans le village de Svinjare, les 137 maisons serbes ont été incendiées
mais les habitations voisines abritant des Albanais de souche sont
restées intactes. A Vucitrn, autre village proche, les 69 maisons
ashkalis ont été détruites, tandis qu'à Kosovo Polje, plus de 100
habitations serbes et roms ont été incendiées, tout comme le bureau de
poste, l'école serbe et l'hôpital serbe. La moindre présence serbe est
irrémédiablement prise pour cible : à Djakovica, des Albanais de souche
ont assiégé l'église orthodoxe serbe qui abritait les seules Serbes
encore présentes dans la ville : cinq femmes âgées. Ces dernières ont
dû être évacuées.

Bien que les troupes de la KFOR dirigées par l'OTAN et la police civile
internationale de la MINUK aient pour mandat spécifique d'assurer la
sécurité des minorités au Kosovo, elles ont failli à leur mission de
protection lors des émeutes, laissant souvent les minorités serbes ou
autres à la merci des meutes d'Albanais de souche pendant de longues
heures avant d'enfin réagir. A Svinjare, un groupe important d'Albanais
de souche est passé juste en face de la principale base française de la
KFOR pour se rendre dans le village, avant de bouter le feu à toutes
les habitations appartenant aux minorités. La KFOR n'est pas venue au
secours des Serbes, alors que Svinjare est située à quelques centaines
de mètres de la base. La KFOR française n'a pas non plus réagi lors de
l'attaque anti-ashkali perpétrée à Vucitrn, bien que le village se
trouve à proximité de deux bases françaises de la KFOR.

Les troupes de la KFOR sous le commandement allemand ne se sont pas
déployées pour protéger la population serbe et ses églises et
monastères orthodoxes historiques, en dépit des appels à l'aide répétés
qui émanaient des policiers allemands de la MINUK basés dans la ville.
Le village de Belo Polje, proche de la principale base italienne de la
KFOR, a été réduit en cendres. Dans la capitale Pristina, des Serbes
ont été forcés de se barricader dans leurs appartements pendant que les
émeutiers d'origine albanaise tiraient sur eux, pillaient et brûlaient
les appartements des étages inférieurs. Il a fallu six heures avant que
la KFOR et la MINUK ne leur viennent en aide. Les violences ont été
déclenchées par une série d'événements, en particulier des accusations
sensationnalistes et en définitive non fondées selon lesquels des
Serbes étaient responsables de la noyade de trois garçons d'origine
albanaise. Les autres détonateurs ont été d'une part la colère qui
s'est emparée des Albanais de souche en raison du blocage de la
principale route Pristina-Skopje par des villageois serbes qui
voulaient protester contre le meurtre par balle d'un adolescent serbe
par des inconnus, et d'autre part la manifestation du 16 mars organisée
par des groupes d'anciens combattants et autres individus liés à
l'Armée de Libération du Kosovo (UCK) maintenant dispersée, lesquels
protestaient contre l'arrestation d'anciens dirigeants de l'UCK
inculpés de crimes de guerre.

"Les violences devraient être un signal d'alarme pour l'OTAN et les
Nations Unies" a déclaré Rachel Denber. "Les paroles seules ne
suffisent pas pour protéger les communautés minoritaires ou créer un
Kosovo multiethnique. Ce qu'il faut ici, c'est une véritable réforme
des structures de sécurité internationales."

Human Rights Watch a réclamé une enquête indépendante et approfondie
sur la réaction de la KFOR, de la police de la MINUK et du KPS face aux
violences. Le rapport recommande par ailleurs que la KFOR et la police
de la MINUK reçoivent une formation et du matériel adéquat pour pouvoir
contrôler les émeutes, et que la structure de commandement de la KFOR
soit plus centralisée