Informazione
By Timothy Less
Alep, plaidoyer pour la liberté d’analyse et une géopolitique cohérente de la France
- 22 Déc 2016
Ces derniers jours, j’ai été la cible d’attaques répétées, dans plusieurs médias –FranceInter, Le Monde, le JDD, Libération et Le Nouvel Observateur –, tendant à me présenter comme un soutien de Bachar el-Assad et/ou de Poutine et à m’accuser d’incompréhension par rapport aux événements en cours en Syrie, voire d’insensibilité face à la tragédie vécue par les civils d’Alep. Il est bien entendu qu’à travers ma personne, il s’agit là de viser Jean-Luc Mélenchon en tant que candidat à la présidence de la République, porteur d’une vision de la guerre en Syrie et d’une ligne géostratégique indépendantiste pour la France à même de redonner à notre pays sa grandeur et son autonomie. Gardant l’espoir que le débat reste encore possible – sur cette question comme sur toute autre. Je me permets donc de répondre à ces critiques, tout en précisant que je ne minimise pas les souffrances du peuple syrien, mais que je dénonce la propagande mensongère et le deux poids deux mesures qui conduisent aux guerres futures. Je ne suis pas favorable au dictateur Bachar-Al Assad, mais je dénonce le terrorisme djihadiste sanguinaire et l’ineptie de la ligne géostratégique française. Je ne suis pas pro-Poutine comme le répètent les atlantistes, je suis pour l’indépendance de la France.
Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire, c’est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe et de ne pas faire écho aux applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques – Jean Jaurès, Discours à la jeunesse, Juillet 1903.
Excuses sur un des tweets et pratiques journalistiques
Précisons tout d’abord qu’on me reproche essentiellement deux « tweets », que l’on juge ignominieux. Dans le premier, j’affirme que la couverture médiatique des événements en Syrie est orwellienne. Dans le second, je remarque que l’information selon laquelle le principal hôpital d’Alep a été détruit par les bombardements a été répétée plusieurs fois sur les quelques derniers mois. C’est en extrapolant à partir de ces deux publications de 140 caractères chacune qu’on me reproche de manquer de compassion à l’égard des civils tués et de ne pas dénoncer, comme je devrais, la barbarie dont font preuve les régimes de Bachar el-Assad et celui de Vladimir Poutine.
Si je ne retire rien au premier tweet concernant la propagande orwellienne – je m’en explique plus amplement plus bas –, je regrette le second sur l’hôpital. En raison de la concision des messages Twitter, aucune argumentation sérieuse n’est possible, ce qui laisse la porte ouverte à toutes les interprétations, y compris les plus absurdes et haïssables. Ce tweet, qui cherchait à dénoncer la propagande à l’œuvre dans les guerres sur un exemple spécifique, a blessé un grand nombre de camarades du Parti de Gauche, comme de citoyens non partisans, légitimement horrifiés par les images de morts provenant d’Alep. Je m’en excuse publiquement, mais demande de me faire la grâce de lire ce texte jusqu’au bout, car si condamné je dois être, moralement, publiquement ou politiquement, autant que ce soit pour les bonnes raisons et en toute connaissance de cause. Ces explications sont aussi exhaustives que possible, et permettent à chacun d’accéder aisément aux sources par liens hypertextes.
Je voudrais d’emblée souligner que contrairement à ce que devrait être une pratique journalistique de base, je n’ai été contacté par aucun des journalistes qui m’incriminent en extrapolant des positions politiques générales à partir de deux tweets ou en reprenant ce que leurs collègues ont initialement dit ou écrit. On conviendra qu’il s’agit là d’une attitude étrange pour les thuriféraires des valeurs démocratiques dont ils seraient les uniques défenseurs.
Un émoi légitime face au drame humain vécu par les civils et l’expression d’un dissensus
Non, je ne suis pas indifférent à la mort et à la souffrance d’enfants dans les guerres. Je les connais même sans doute mieux qu’une grande partie des personnes qui me le reprochent, pour avoir été, dans le cadre d’une opération humanitaire, assistant responsable d’un camp pour enfants orphelins ou perdus au Rwanda en 1994, peu après le génocide, mais aussi pour avoir vu une ville – Belgrade, où je suis né – bombardée, en 1999, par la plus formidable armada aérienne de l’histoire, conduite par l’OTAN. Ces bombardements, dont la ville garde toujours les stigmates, n’avaient d’ailleurs suscité à l’époque aucun émoi en Occident. Enfin, j’ai eu l’honneur de servir en tant qu’officier dans l’armée française ; participer à une opération extérieure en Afghanistan, en 2006-2007, m’a donné l’occasion d’appréhender directement la guerre et la tragédie qu’elle représente.
Il ne s’agit donc pas de ma part de nier la tragédie vécue par les civils pris sous les bombes, et on cherchera en vain une citation en ce sens venant de ma part. Les morts, d’Alep ou d’ailleurs, surtout des enfants, font au contraire écho aux images épouvantables que je porte dans ma mémoire. La prise d’une ville – moment particulièrement sanglant dans tout conflit armé – est toujours une catastrophe pour les civils, otages et cibles – volontaires ou non – des belligérants, qui risquent de manquer de nourriture, d’être blessés, violentés ou tués. Même si le combat est moralement et politiquement légitime, la violence subie par les civils est intolérable et particulièrement cruelle dans les zones urbaines où chaque rue est une nasse, où la menace de tireurs embusqués est omniprésente. Devant toute souffrance de civils, on ne peut que compatir ; pour reprendre les termes souvent utilisés ces derniers jours par les médias, elle signe toujours, peu ou prou, la mort de l’humanité. Mais partout et à chaque fois ; pas uniquement à Alep. Au-delà de ce constat, commun à tous les êtres humains doués de sensibilité, les conflits armés, pas plus que n’importe quel autre événement, ne peuvent échapper aux interprétations divergentes. Le problème survient lorsqu’un conflit en particulier acquiert soudain un statut spécial dans la couverture médiatique pour devenir une sorte d’icône dont il est interdit de commenter le sens.
C’est précisément ce qui se passe avec la bataille d’Alep. Dans la longue série de conflits qui ont secoué le monde, et en particulier le Moyen-Orient, depuis quinze ans, peu d’événements ont suscité une adhésion aussi massive des commentateurs à une version particulière de l’histoire et ont produit une injonction aussi forte adressée à tout un chacun de s’y conformer. Dans ce contexte, toute voix discordante, qui s’interroge à la fois sur la production de ce consensus, sur les raisons de l’émotion collective ainsi construite et sur le bien-fondé de l’éclairage apporté apparaît proprement hérétique. Pourtant aucune tragédie ne nous exonère du devoir non seulement de compatir, mais aussi de chercher à comprendre ; et ce n’est pas en clouant au pilori quiconque s’écarte de la version « approuvée » du conflit syrien qui prévaut dans les médias qu’on résout les problèmes qui conduisent à ces tragédies. Je crois au contraire que c’est le rôle d’un responsable politique de sortir du cadre compassionnel commun – même s’il est légitime – pour s’interroger sur les causes, comprendre dans toute sa complexité la course des événements qui conduisent aux drames et chercher des réponses adéquates.
Revenons donc aux deux tweets incriminés pour en développer le propos. Le tweet qui affirme que le dernier hôpital d’Alep a manifestement été détruit une quinzaine de fois ne vise pas, encore une fois, à moquer la tragédie d’enfants qui meurent à Alep faute de soins ; il cherche à attirer l’attention sur l’incroyable guerre de l’information qui double les hostilités physiques sur le terrain, utilisant tous les moyens possibles pour provoquer l’émotion, l’indignation et la haine. Cette propagande est évidemment menée par toutes les parties ; est-ce une raison suffisante pour ne pas dénoncer les excès commis du « bon » côté, le nôtre ? J’aurais d’ailleurs tout autant pu aborder cette propagande par d’autres biais. Quoi qu’il en soit, l’erreur a été de le faire sur Twitter où il est impossible de développer une réflexion construite.
Dans les articles de Libération et du Monde, il est écrit que je ne base ma remarque que sur des tweets informant de la destruction du « dernier hôpital d’Alep » et non sur des articles de véritables journalistes écrivant dans la presse respectable. Il est vrai que les tweets sur le sujet sont légion – les recenser serait beaucoup trop long –, mais contrairement à ce qui a été suggéré dans ces articles, mon tweet malheureux m’a bien été inspiré par la lecture de la presse légitime. Mon tweet datait du 13 décembre ; voici quelques exemples de publications antérieures que Le Monde et Libération peuvent considérer comme sérieuses car produites par leurs confrères : Le Monde du 21 octobre« Alep sans médecins ni chirurgiens », le Washington Post du 16 novembre « Les avions de guerre bombardent l’hôpital des enfants alors qu’Assad relance l’offensive sur Alep », The Guardian du 19 novembre « Le dernier hôpital d’Alep-Est détruit par des frappes aériennes », le Huffington Post du 21 novembre « Les bombardements forcent les médecins à fermer le dernier hôpital pour enfants d’Alep », Al-Jazeera du 27 novembre « Dans le dernier hôpital d’Alep-Est même plus d’espace pour marcher », L’India Times du 4 décembre « En Syrie partie 3 : Avec le dernier hôpital détruit, Alep s’annonce comme le plus grand bain de sang de l’Histoire contemporaine ». Encore une fois, il ne s’agit pas de nier la souffrance bien réelle que peuvent endurer les civils pris sous le feu destructeur, mais de montrer à ces journalistes et à ceux qui ont pu être choqués par mon tweet que je ne suis pas de mauvaise foi et que je sais, en tant qu’ancien officier des opérations psychologiques, reconnaître une manipulation destinée à impressionner.
Ce reproche est par ailleurs relativement cocasse compte tenu du fait que les tweets sont souvent la seule base des informations dont disposent les journalistes qui me critiquent. En effet, il y a très peu de journalistes sur le terrain et aucune organisation internationale digne de ce nom, comme le rappelle fort justement le journaliste Patrick Coburn dans The Independent du 2 décembre « Voilà pourquoi tout ce que vous avez pu lire sur la guerre en Syrie pourrait s’avérer faux ». L’autre source d’information des médias, aveuglément reprise depuis des années, est l’organisation portant le nom irréprochable d’Observatoire syrien des droits de l’homme. Il s’agit en fait d’une source particulièrement illégitime puisqu’elle est une émanation des Frères Musulmans, financée par l’Arabie Saoudite et le Qatar et… basée à Londres ; pourtant, elle est la référence pour dénoncer les crimes et compter les morts. C’est, je l’affirme, une manipulation pure et simple du public, qui dure depuis trop longtemps.
Le caractère orwellien de la couverture médiatique du conflit
Oui, pour qualifier la couverture médiatique du conflit en Syrie, j’ai utilisé le terme « orwellienne », et je suis prêt à réitérer cette qualification. Par orwellien, j’entends faisant penser à la réalité décrite par Orwell dans 1984. Dans ce roman, les trois puissances qui se partagent le monde – Océania, Estasia et Eurasia – sont perpétuellement en guerre, et voilà comment l’auteur décrit la manière dont cette guerre est présentée à la population : « Mais retrouver l’histoire de toute la période, dire qui combattait contre qui à un moment donné était absolument impossible. Tous les rapports écrits ou oraux ne faisaient jamais allusion qu’à l’événement actuel. En ce moment, par exemple, en 1984 (si c’était bien 1984) l’Océania était alliée à l’Estasia et en guerre avec l’Eurasia. Dans aucune émission publique ou privée il n’était admis que les trois puissances avaient été, à une autre époque, groupées différemment. Winston savait fort bien qu’il y avait seulement quatre ans, l’Océania était en guerre avec l’Estasia et alliée à l’Eurasia. Mais ce n’était qu’un renseignement furtif et frauduleux qu’il avait retenu par hasard parce qu’il ne maîtrisait pas suffisamment sa mémoire. Officiellement, le changement de partenaires n’avait jamais eu lieu. L’Océania était en guerre avec l’Eurasia. L’Océania avait, par conséquent, toujours été en guerre avec l’Eurasia. L’ennemi du moment représentait toujours le mal absolu et il s’ensuivait qu’aucune entente passée ou future avec lui n’était possible. »
Oui, la couverture médiatique du conflit en Syrie m’a souvent fait penser à cette citation d’Orwell. En 2001, à la suite des attentats de New York, Al-Qaïda a été désignée comme le mal absolu et combattue par la coalition internationale sur tous les fronts possibles. Et d’une certaine manière légitimement : ne s’agit-il pas d’une organisation terroriste criminelle, agissant à l’échelle internationale, et dont Daech n’est qu’un des avatars ? Al-Qaïda est encore combattue aujourd’hui au Mali par les forces armées françaises, qui y ont mené et y mènent un remarquable et difficile combat contre les terroristes et autres criminels (opérations Serval, Epervier, puis Barkhane). Elle a frappé les villes européennes, le 11 mars 2004 à Madrid, le 7 juillet 2005 à Londres ou encore à Paris lors de l’attentat contre Charlie Hebdo le 7 janvier 2015 par les frères Kouachi qui se sont revendiqués spécifiquement d’Al-Qaïda au Yémen. À chaque fois, là aussi légitimement, l’émotion populaire a été immense, l’inquiétude et la colère aussi. L’État islamique a ensuite pris le relais, avec les terribles attaques de novembre 2015, dites du Bataclan, les pires qui aient jamais ensanglanté la France. Et je ne parle même pas ici du volume proprement sidérant de victimes provoquées par ces organisations lors d’opération terroristes conduites dans des pays musulmans (ou dont la religion majoritaires est l’islam) : plus de 30 000 morts depuis les attentats de Charlie Hebdo – que l’on se représente bien ce chiffre, qui ne semble pas gêner ceux qui ont quelques tendresses pour les avatars d’Al-Qaïda, rapidement repeint en démocrates, du seul fait qu’ils combattent contre les troupes syriennes régulières et les Russes. Il faut aussi bien se souvenir de ce chiffre quand les mouvances d’extrême droite en France tentent de faire croire que les terroristes islamistes en veulent exclusivement à la France ou à l’Occident ou à leurs valeurs. Le terrorisme islamiste représente une plaie internationale frappant tousazimuts et sans distinction de nationalité, de religion ou de zone géographique ; c’est un des multiples fléaux de la mondialisation incontrôlée, dont les racines théoriques se trouvent dans les monarchies théocratiques wahhabites du Golfe, Arabie Saoudite et Qatar en tête.
Mais ces derniers mois, la couverture du conflit en Syrie – l’un des fiefs de ces deux organisations islamistes – semble frappée de schizophrénie. On parle de temps en temps de l’EI, plus jamais d’Al-Qaïda ou si peu, en catimini ; on parle beaucoup de la guerre menée par Bachar el-Assad ; mais on ne rapproche jamais ces deux informations. Certes, lorsqu’on le fait, le tableau qui en ressort est moins simple et moins confortable que celui d’une guerre où le bien (les rebelles démocratiques) combattrait le mal (le régime totalitaire). Mais cette amnésie et cette incapacité à faire tenir ensemble toutes les données nécessaires à la compréhension de la situation, fussent-elles inconfortables, suit très précisément le schéma orwellien décrit dans le passage de 1984 cité plus haut, qu’Orwell appelle la « double pensée ». Est-il criminel de remarquer cette particularité inquiétante de la couverture médiatique de ces tragiques événements ? D’essayer d’en comprendre les raisons ? De rappeler l’autre côté de la réalité, qu’on essaie sans cesse de refouler au point où certains communiqués qui passent dans les informations deviennent proprement incompréhensibles ? Ainsi, lors des combats simultanés à Palmyre et à Alep des dernières semaines, il était très malaisé pour une personne moyennement informée de comprendre qui attaque qui dans ces villes, les « gentils » et les « méchants » semblant changer de rôles sans aucune explication.
Par ailleurs, d’autres conflits tragiques aux conséquences humanitaires comparables, parfois pires, sont en cours au même moment sans que cela ne produise un émoi équivalent, ni dans les médias ni au sein du gouvernement. Il ne s’agit pas de nier les souffrances à Alep en en invoquant d’autres ailleurs, mais de s’interroger sérieusement sur le désintérêt quasi complet, ou au mieux léger et parcellaire, pour les autres conflits. Je tiens à préciser ici que je ne porte aucun jugement sur les citoyens français, mais sur les médias et les politiques qui s’adressent à eux. Je pense que l’émoi et l’horreur seraient pires encore si pendant plusieurs semaines on montrait dans les médias les souffrances des civils yéménites. Que se passe-t-il là-bas ? Un conflit qui dure depuis presque deux ans ou au moins 10 000 civils sont morts, dont au moins 4 000 en raison de bombardements, et où… 14 millions de personnes ont besoin d’une aide alimentaire. Pire, au Yémen, selon l’UNICEF, 2,2 millions, oui, 2,2 millions d’enfants souffrent de malnutrition aigüe dont 460 000 de malnutrition aigüe sévère. Je ne posterai pas ici de photos d’enfants en « malnutrition aigüe sévère », mais c’est terrifiant. Face à cette tragédie, le nouveau Premier ministre de la France n’évoque pas un crime contre l’humanité ; et pourtant c’est le cas, mais c’est dû à une guerre menée par l’Arabie Saoudite et le Qatar avec l’appui des États-Unis, soit tous des « alliés » de la France, qui livre aux deux premiers pays des armes en volume considérable. Les causes de la malnutrition et de la famine sont simples : le Yémen, pays pauvre avec peu de terres arables, importe la plus grosse partie de son alimentation, or les ports de ce pays subissent un blocus militaire de la part de l’Arabie Saoudite et du Qatar. Où est l’indignation ? Où sont les reportages ? Où sont les tribunes envolées dans nos médias et les pétitions en ligne ? Où sont les sanctions économiques ? Quid des résolutions à l’ONU ? On se le demande.
On se souviendra également du bombardement, le 3 octobre 2015, de l’hôpital de Kunduz tenu par Médecins sans Frontières, dont on trouvera le rapport ici. Ce n’était pas le premier hôpital bombardé par les États-Unis. Peut-être était-ce par erreur ? En tout état de cause, la couverture médiatique en avait été assez sobre et nul appel exigeant une explication de la part des États-Unis n’a vu le jour, pas plus, bien sûr, que des demandes de sanctions.
Être la patrie des droits de l’homme ne nous autorise justement pas à utiliser ces droits et l’indignation dont en suscite la violation de façon variable. On ne peut pas les invoquer uniquement pour dénoncer les actions de nos adversaires ou concurrents géopolitiques et les oublier lorsqu’il s’agit d’opérations menées pour appuyer notre hégémonie, ou celle de notre suzerain, les États-Unis. Si les droits de l’homme ne sont pas invoqués systématiquement et avec la même force pour tous les crimes, alors ils sont dévoyés.
Qui défend Alep, « djihadistes islamistes » ou « rebelles modérés » ?
Une fois intégré l’aspect toujours terrifiant de toute guerre, en particulier dans les zones urbaines, la question à se poser est de savoir qui fait la guerre contre qui et dans quel but politique. Il est bien évident que si la ville d’Alep était défendue par des « rebelles modérés » ou des forces combattantes démocratiques visant à renverser le régime dictatorial d’Assad, la légitimité de leur combat aurait été totale, le crime des Russes complet et la non-assistance par les États occidentaux tragique. C’est en gros le tableau dessiné dans nos médias. Malheureusement, la réalité concrète est tout autre.
Il est important de noter qu’un des premiers axes de propagande est d’avoir créé la confusion dans les esprits en se référant à Alep alors que les combats et les bombardements avaient lieu à Alep-Est. Alep-Ouest est tenue depuis des années par le gouvernement syrien et compte plus d’un million d’habitants ; c’est là qu’allaient se réfugier, le plus souvent, les civils qui pouvaient se dégager d’Alep-Est. Alep-Est, elle, comptait moins de 150 000 habitants (dans la dernière phase des combats, depuis le 15 novembre, Robert Balanche, chercheur au Washington Institute for Near Est Policy, n’en comptait plus que 20 à 30 000), que la guerre a forcés à vivre dans des conditions abominables : sans accès à l’eau potable, aux soins ou à une nourriture descente. La dureté des conditions de vie, inhérente à la tragédie que vivent les populations civiles en état de siège, était aggravée par les privations organisées volontairement par les groupes djihadistes qui nous ont été présentés comme défendant les populations ; ainsi lors de la prise d’Alep-Est a-t-on pu assister à la découverte de colossales réserves de nourriture, détournées de l’aide humanitaire et refusées aux populations civiles. Par ailleurs, les djihadistes tiraient depuis des mois sur Alep-Ouest (souvent depuis l’hôpital d’Alep-Est), et surtout sur les zones chrétiennes – sans, là non plus, provoquer une grande émotion dans nos médias (un exemple ici tiré du Monde ou du Point).
Si la ville d’Alep-Est était tenue principalement par des djihadistes apparentés d’une manière ou d’une autre à Al-Qaïda ou à Daech, la ligne morale et politique à tenir face aux événements devient beaucoup moins évidente. Pouvait-on soutenir sans réserve leurs revendications et leur combat contre l’armée de Bachar el-Assad ? Souhaiterions-nous sérieusement que des organisations terroristes prennent le contrôle de villes entières, de régions, voire de l’États, et s’y implantent durablement ?
On me rétorquera peut-être qu’assimiler la rébellion démocratique aux islamistes d’Al-Qaïda relève d’un simplisme outrancier. Pourtant les informations indiquant que la rébellion démocratique a depuis longtemps été phagocytée par les djihadistes ne manquent pas ; on se réfèrera utilement à l’article du journaliste Bachir El-Khoury dans Le Monde diplomatique intitulé « Qui sont les rebelles syriens ? » (du mois de décembre et toujours disponible en kiosque), qui a le mérite d’être exhaustif tout en adoptant un ton neutre. On pourra aussi se référer à Robert Balanche dans La Croix : « A Alep-Est, les rebelles sont cantonnés dans un périmètre d’environ 10 km², où ils compteraient 6 000 à 7 000 combattants. Ceux-ci appartiennent en majorité à deux groupes de la coalition salafiste-djihadiste Jaish Al-Fatah, le Front Fatah Al-Cham (ex-Front Al-Nosra, branche syrienne d’Al-Qaida), de tendance internationaliste, et Ahrar Al-Cham, de tendance locale. « Il n’y a pas de groupe laïque à Alep-Est depuis 2012-2013, précise le chercheur. Tous ont été éliminés par les islamistes ». Ou encore à Robert Fisk dont l’analyse, que je fais mienne, dans cet article de The Independent est la plus lucide tant sur la situation globale, les combats à Alep, la cruauté du régime syrien, la bouffonnerie de nos gouvernements et les conséquences à long terme : « Mais il est temps de dire l’autre vérité: que nombre des « rebelles » que nous, les Occidentaux, avons soutenus – et que notre absurde premier ministre Theresa May a indirectement bénis (…) – sont les plus cruels et les plus impitoyables des combattants au Moyen-Orient. Et tandis que nous avons été saisis d’effroi par Daech pendant le siège de Mossoul (un événement trop semblable à Alep, bien que vous ne le penseriez pas en lisant notre récit de l’histoire), nous avons volontairement ignoré le comportement des rebelles d’Alep ».
La réalité, c’est que les « rebelles modérés » comme nous aimons à les qualifier dans les médias dominants sont pour la plupart des combattants d’Al-Nosra (soit Al-Qaïda) ou sous la coupe de cette organisation. Ces fanatiques au pouvoir seraient la pire chose que l’on puisse souhaiter à un pays – même la très étasunienne fondation Carnegie ne peut que constater la volonté d’Al-Nosra de transformer la Syrie en un État régi par la Charia. Pour la sécurité de la France et de l’Europe, pour l’avenir de la Syrie, la première chose à faire est de se débarrasser de ces groupes terroristes et d’organiser une transition démocratique sous mandat de l’ONU.
Il faut bien comprendre ce qui s’est passé à Alep-Est. Dans cette partie de la ville, les djihadistes en perte de puissance, acculés, font ce qu’ils ont fait hier à Manbij et ce qu’ils feront demain à Mossoul, après-demain à Raqqa, Al-Bab ou Idlib : prendre en otage les populations, exécuter ceux qui tentent de fuir et s’en servir comme boucliers humains, le plus souvent en s’abritant dans ou autour des éventuels hôpitaux. En août dernier, les forces armées kurdes de l’YPG (Unités de Protection du Peuple, l’armée du Rojava) ont repris aux djihadistes de Daech la ville de Manbij, au prix de terribles combats. Lors de la phase finale de l’assaut, les Kurdes ont dû négocier avec les djihadistes et avec les États-Unis un accord dont les termes étaient les suivants : les djihadistes survivants pourraient se retirer avec leurs familles, leurs blessés et leurs armes légères, les États-Unis promettant de ne pas les bombarder dans leur retraite vers Raqqa ; en échange les djihadistes promettaient de ne pas exécuter les milliers de civils pris en otage, ainsi que l’a décrit Patrice Franceschi. La bataille de Manbij n’était qu’une, bien qu’héroïque, parmi tant d’autres combats (par exemple à Kobané) livrés par les Kurdes. Éminemment utile pour la France, il ne provoquera pas d’émoi particulier, car ne sera que peu relaté, même si l’on doit souligner l’assistance des forces spéciales françaises dans ces combats. À Alep-Est, il se passe peu ou prou la même chose qu’à Manbij : les combattants djihadistes ont tenu la population civile en otage – si l’on veut une source parfaitement officielle pour s’en convaincre, on peut consulter le rapport de Robert Coville, porte-parole du Haut Commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme. Désormais, les combattants survivants étant autorisés à quitter Alep par les Russes, qui organisent ces corridors et l’armée syrienne, pour aller au Nord vers les territoires et villes encore sous leur contrôle. À Mossoul, la coalition menée par les États-Unis attaque et livre, elle aussi, combat dans des hôpitaux. Et pourquoi ? Non pas par barbarie étasunienne ou irakienne, mais par nécessité, parce que les djihadistes de Daech ont fait de l’hôpital de Mossoul un centre de commandement. Il s’agit d’une stratégie délibérée et systématiquement appliquée par des fanatiques, à Alep-Est comme ailleurs. Demain, il faudra organiser les mêmes corridors pour libérer les derniers civils et permettre aux djihadistes survivants de se replier sans quoi ils se feront sauter. Non, l’idée que les civils d’Alep-Est étaient tenus en otage par les combattants islamistes n’est pas juste une opinion, mais une réalité avérée par les faits. Le pire est à venir quand l’une ou l’autre des coalitions arriveront au dernier bastion tenu par les djihadistes, quand il n’y aura plus ultimement où fuir, alors un immense bain de sang sera à craindre.
La forte présence d’islamistes dans les rangs des combattants n’est en rien une surprise, ni une anomalie. Même un spectateur non averti qui s’est intéressé au minimum à la manière dont les choses se sont déroulées dans tous les pays touchés par le printemps arabe a pu se rendre compte que dans cette région l’islamisme prospérait sur le terreau de l’instabilité étatique et de la guerre civile, et qu’en l’absence de solution politique rapide, c’est lui qui occupait généralement le terrain. La lecture des rapports, dès 2011, de personnalités comme Alain Chouet, ex-patron du service de renseignement de sécurité de la DGSE, longtemps en poste en Syrie, aurait été utile à certains (voir des éléments ici). Certes, si les islamistes ont pu à ce point s’imposer au sein de l’opposition anti-Assad, c’est aussi parce que les puissances occidentales ont tardé à soutenir les manifestations contre le régime ; mais ils étaient là dès l’origine, et l’issue actuelle n’était alors en rien imprévisible. En partant de cette donnée du terrain, et quelles que soient les réserves qu’on peut émettre à l’égard du régime syrien, surtout au bout de cinq ans de guerre civile, la position consistant à soutenir la puissance étatique, dans cette région, ne peut pas juste être balayée d’un revers de main au prétexte qu’elle serait immorale. Elle l’est certainement en partie, car c’est le cas de toutes les positions réalistes ; mais l’est-elle plus que celle qui consiste à « oublier » qui sont les insurgés qui ont tenu les quartiers est d’Alep, y retenant des civils en otage ? Que celle qui consiste à refuser de combattre ces groupes, dir
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УОЧИ СЛЕДЕЋИХ ГОДИНА
Пише: Мира Марковић
Мислио је на време у коме ће почети слобода за све народе и за све људе и равноправност међу њима.
Пут до тог времена је дуг и тежак али средином прошлог века велики део човечанства је њим кренуо. И Југославија, наша ондашња земља, је на њему била један од најбржих и најстраснијих путника. И успела је да живи у том времену пре свих, додуше кратко.
Али, већ на самом почетку неки су се путници уморили, обесхрабрилили су их тежина и дужина пута, неки су посумњали у реалност таквог циља, многима је била ближа садашњост са свим својим недостацима, него будућност – хуманија и лепа, али далека, у којој они неће стићи да живе.
Тако је било са некима, па са многима, па онда, скоро са свим путницима. Та будућност, далека и ако је буде, нека буде препуштена избору и ходу неких других поколења.
И тако се човечанство ипак крајем прошлог века одлучило за садашњост, да је поправи где јој налази мане, и за ону будућност која је временски садржајно и креативно доступна и могућа.
Већ се налазимо у прилично поодмаклој другој половини друге деценије двадесет првог века. Данас кад се каже будућност мисли се на следеће две – три године, на пет, 2025. година је већ предалека.
Блиска будућност, по свему, са разлогом личиће на садашњост, изгледаће можда овако.
1. Експлозиван материјални, економски и техничко-технолошки развој у развијеном делу света (Северна Америка, Северна, Западна и Централна Европа, најдаљи Исток) и са њим неускалђена друштвено-политичка организација друштва. Као и сваки пут у историји, материјални развој је бржи од друштвеног, њихова некомплементарност окончава се тако што се мирним или немирним (а обично немирним путем) мења постојећи друштвени систем да би, усклађен са материјалним корпусом, омогућио његов даљи развој и тиме развој друштва у целини.
У том смислу неопходне промене друштвених система би требало да: ограничавају улогу државе, планетарно интегришу економски, социјални и културни живот, гасе представничку демократију, афирмишу непосредну и безпартијску демократију, и тако даље.
У нарендим годинама или у наредним деценијама до тих промена у дрштвено-политичком животу неће доћи и планетарни интегративни процеси које налаже материјални, техничко-технолошки и економски развој имаће и даље препреку у друштвеним системима који ће их кочити. Тензије иземђу материјалног и друштвеног тешко да ће се окончати без притисака, или насиља, од стране прогресивних друштвено-политичких субјеката чији циљ треба да буде ослобађање материјалног и економског живота од друштвених и политичких стега – конзевативних државних и националних интереса, односно конзервативног разумевања државних, националних, па и личних интереса.
2. Социјалне, односно класне разлике остаће и даље драматично и примарно лице следећих деценија. Оне ће се, као и до сада испољавати на мирко и макро нивоу.
На микро нивоу у оквиру држава и народа и на макро нивоу глобално.
У развијеним друштвима на микро нивоу ће се те разлике смањивати захваљујући укупном друштвеном развоју. Високо развијене државе на Западу и Северу Европе захваљујући великом материјалном богатству довешће до радикалних позитивних промена у социјаној структури становништва. Смањиваће се сиромаштво, нестајеће лумпенпролетаријат. Али ће разлике између богате мањине и сиромашне већине и даље обележавати сва друга, мање развијена и неразвијена друштва. Као што ће на глобалном нивоу та диференцијација не само трајати већ показати тенденцију раста.
Високо развијена друштва су у свим димензијама свог развоја оставила далеко иза себе двадесети век, али тај развој и даље дугују експлоатацији природних богатстава неразвијеног света који је, међутим, и даље неразвијен, често као што је био и пре неколико векова.
Између НАСЕ и Јужног Судана смештено је више векова него што их је било између Нероновог царства и живота у Долини Брамапутре. Чак више него између Циришке Линден штрасе и бразилске фавеле 1963. године.
3. И даље ће се водити локални ратови као пљачкашки походи за потребе мултинационалних компанија. И даље ће се ширити експанзионизам и светска доминација највеће војне, економске и технолошке силе са нескривеном тенденцијом ка глобалној колонизацији.
Али ће и даље трајати пацификација могућих организованих и енергичних напора прогресиног света да се та колонизација заустави.
Јачање две велике силе, Русије и Кине, у првој половини двадесет првог века није успело да заустави колонијалне претензије са Запада – НАТО и администрације САД.
Али, с обзиром да су, у крајњој линији те претензије уперене ка њима могло да дође до оружаних сукоба који би добили глобални карактер. Да ли би то био Трећи светски или последњи светски рат зависило би од техничко-технолошког оружја којим би се водио. Постојећа сазнања о домашају тог оружја указују на његов апокалиптични карактер.
4. Већина савремених друштава, односно држава, је организована на принципу парламентарне демократије. Тамо где је та демократија стартовала пре неколико векова, она представља истрошен историјски образац, у срединама где је новијег датума манифестује се прилично карикатурално с обзиром на број партија и одсуство њиховог политичког идентитета.
У већини друштава организованих као парламентарна или представничка демократија губе се политичке разлике међу партијама, постоје само номиналне, лингвистичке и симболичке, па је вишепартијски систем то све више само формално а у ствари се трансформише у једнопартијски. Разлике између левице и деснице се смањују, са тенденцијом да се потпуно изгубе.
Левица је одустала од радикалних потеза у погледу промене друштва, определила се да постојеће коригује, поправља и тиме се приближила десници која је, иако решена да сачува постојеће друштвене прилике, допустила промене које треба да их усаврше.
Партијским животом доминира једна мисао и она ће доминирати и даље, још неко време, пре него што вишепартијски систем и парламентарна демократија не издахну, препуштајући своје место непосредној, стварној демократији.
Али бар до 2025. године непосредна демократија се неће догодити. Тешко да ће се афирмисати чак и као политички и друштвени идеал. (Краткотрајна најава такве демократије средином прошлог века у Југославији, она будућност о којој пише Кангрга, постаје излет у небо, антиципација живота који ће се догодити ако га не предухитри апокалиптични рат или ако га не одложи за дуго недостатак разума и енергије да се тај рат избегне.
5. Електронска, дигитална цивилизација (настала из претходног такозваног информационог друштва) развија се темпом чију је брзину тешко предвидети.
Мада, по свему тај темпо биће најдинамичнија динамика најближе будућности.
Та динамика измешта човеков живот, бар у развијеном свету, на ниво у коме физичке, административне, па и професионалне активности преузима „машина“.
То човека чини слободним, али га истовремено и лишава слободе.
„Машина“ има услова да стави човека под контролу и она то већ чини. Та контрола може да буде палијативна и битна. Може да буде парцијална и целовита. Она је већ у овом тренутку све мање палијативна и парцијална. Све је више битна и целовита. У тренутку када је захваљујући електронском развоју стекао слободу, човек је у том истом тренутку и изгубио.
Двојство те цивилизацијске тековине је енигма за коју данас нема изгледа да буде решена у интересу човека, али по свему неће бити решена ни сутра.
6. Неуравнотежени развој наука траје већ неколико деценија. Природне, техничко-технолошке и примењене науке се развијају темпом који превазилази брзину којом су се развијале кроз читаву досадашњу историју. И тај ће темпо бити настављен. Истовремено, друштвене науке, пре свега општа наука о друштву, и њене посебне дисциплине, стагнирају, налазе се између псеудофилозофских опсервација и неуредне, неамбициозне дескрипције.
Ако је савременом свету потребна нека контрола у позитивном смислу, једна од првих треба да буде она над применом резултата природних и техничко-технолошких наука. До сада и за сада резултати ових наука су више коришћени против човека него у његовом интересу. А човеков интерес је требало да буде примарни мотив стицања и примене научних сазнања.
Друштвене науке, демотивисане страхом од политике, не само што ће стагнирати, већ ће пропустити прилику да преузму део њене улоге у функционисању и креирању друштва и човековог живота уопште, што по природи ствари у двадесет првом веку треба да чине.
Друшетвене науке су те које треба да усмеравају резултате природних наука у правцу човекових интереса, да заштите човека и његов свет од неразумне и нехумане примене природно-научних и техничко-технолошких сазнања. Друштвене, хуманистичке науке, под претпоставком да су посвећене интересима човека, у симбиози са природним наукама и техничко-технолошким наукама, могу тај интерес да реализују. Тек обједињене, оне могу комплементарно да креирају оптималан живот на планети.
7. Уметност, упркос бољим условима за себе него што их је било када имала, налази се у опасности да се трансформише у свој антипод.
Вајарство је све чешће лишено потребе за обликом, на рачун тобожњег садржаја кога, међутим, нема.
Сликарство потцењујући форму не рачуна на садржај. Он се по потреби може претпоставити, додуше та претпоставка се не сматра неопходном, чак ни потребном.
Књижевност злоупотребљава човекову потребу за површношћу и баналношћу излазећи им у сусрет. Повремено ће им бити додата и вулгарност, тамо где се процени да површно и банално нису довољно комерцијални. Јер је злоупотреба ниских потреба мотивисана још нижим. „Писци“ транспарентне књижевности нису мотивисани тобожњим духовним алтруизмом, већ бруталним егоизмом – финансијском и медијском похлепом.
Повремени вајарски, ликовни и књижевни испади у сферу наводно класичног, у интересу спасавања уметности од њеног антипода, осцилирају од неувиђавног кича до дирљиве наивности. И доприносе, у крајњој линији, процесу уметничке деградације коју су хтели да зауставе.
Највеће резултате у антиуметничком тренду постиже филм. Он се чак и не устеже да своје „стваралаштво“ лингвистички преименује од уметности у индустрију. Огромна већина тих производа је финансијски јефтина, високо тиражна и прилично успешно посвећена етичкој и естетској деградацији Хомо сапиенса.
Осим површности, баналности и вулгарности филмска индустрија промовише и насиље, не само постојеће већ и његову футуристичку верзију, као престижно човеково биолошко, психолошко и цивилизацијско својство.
Ако су остале уметности занемаривале племенитост, солидарност, алтруизам, нежност, хуманизам уопште, па чак и лепоту, филмска уметност је успела да афирмише њихове антиподе. Нажалост без страха да ће бити цивилизацијски онемогућена. Напротив. Охрабрена је одсуством цивилизацијске индолентности, неразумне, готово мазохистичке пасивности.
Друге уметности нејасним садржајем кокетирају са тобожњом мисаоном дубином, савршено свесно и савршено дрско злоупотребљавају страх, не само скромно образованих, већ и оних који су високо образовани, од неспособности да схвате сложеност, од скривене сумње да су недорасли разумевању стваралачке поруке модерног уметничког садржаја.
Филм, за разлику, дакле, од других уметности, те претензије нема.
То јест, филмска индустрија не производи намеру да је филозофска, психолошка, уметнички авангардна појава. И то таква која тобоже еманципаторски конципирана, тражи индиректне, додуше не баш енергичне, начине да афирмише један непатетични хуманизам.
Намере филмске индустрије су планирано комерцијалне, а последице су спонтано нехумане. Мада су уствари и оне планиране. Експанзивна природа те нехуманости није настала спонтано, случајно. Напротив. Она је лабораторијска творевина власника технолошке и финансијске моћи чији је циљ да креирају свет у коме су сви са друге стране те моћи, већина људи, само способни извођачи њене стабилности и експанзије. Непобуњеничка, високо квалификована радна снага у свету којим влада златна милијарда.
Стварна уметност, нова, лепа, као етички и естетски израз доба које треба да буде прогресивно и хумано, налази се пред вратима овог века. Али за сада нема ко да их отвори. Држе их гвоздене полуге империјалног глобализма. Да их савладају, још су крхке руке еманципаторског универзализма.
И биће још прилично дуго. Бар до будућности чије нам је лице доступно.
8. Религија ће још дуго бити присутна на националном и државном нивоу, као што ће и даље, чак и у већој мери, утицати на односе између народа и држава.
Форсирање значаја религије у испољавању националних интереса, као и подстицање религијских несугласица и нетрпељивости у глобалним размерама, има за циљ скретање пажње, и на националном и на глобалном нивоу са примарних разлика и супротности међу људима – социјалних, односно, класних, на секундарне.
Свест о примарности тих разлика подстакла би механизме да се оне смањују, укидају. Тиме би била доведена у питање постојећа цивилизација која на тим разликама егзистира. Њени творци и заштитници као кукавичје јаје подмећу свету старе мржње и нетрпељивости, измишљају нове као прашину бачену у очи милиона људи да не виде антагонизам између сиромаштва и богатства као примарно својство света у коме живе.
Сличну „цивилизацијску“ улогу има и залагање за изједначавање једнополних ванбрачних и брачних веза са вишеполним.
Отпори који том залагању постоје у многим срединама, у читавим државама и код великог броја народа, приписују се конзервативизму и одсуству демократског духа.
И ако је у најмању руку неумесно приписивати читавом једном друштву и народу конзервативизам и недемократичност, са озбиљније тачке гледишта се поставља питање – који то субјект у савременом свету може себи допустити да буде арбитар у оцени вредности као што су прогресивно, демократско, савремено, и тако даље.
Прецењивање значаја и изједначавање истополног и вишеполног мотивисано је истим, претходним лукавством – скретање пажње са секундарне теме да би се отклонила са главне.
Социјална, односно класна сфера друштвеног живота треба да буде маргинализована у интересу подручја које су, међутим, од секундарног значаја за човеков живот и друштво у коме живи. Та политика глобалних размера добила је подршку скоро у свим срединама, има развојну тенденцију и подржавају је и они који би требало да знају да је она уствари највиши домет империјалног лукавства.
9. Савремени капитализам је добио битку против социјализма 1989. године, симболично са падом Берлинског зида, а стварно са укидањем социјалистичког друштвеног система у СССР-у и социјалиситчким земљама у Источној и Централној Европи. Тријумфализам је кратко трајао, на нови „поредак“ брзо су се навикли и побеђени и победници.
Побеђени су брзо, а изгледа и лако, прихватили свој пораз. У ствари су се понашали као да су га једва чекали, односно као да се добровољно одричу живота који им није одговарао. А победници су задовољни победом, после много деценија, коначно одахнули. И пре, а поготово после Другог светског рата, западни капитализам је живео у приличном страху од источног социјализма. Тај страх га је подстакао на многе мере у економском, социјалном, политичком, па чак и културном животу које су га учиниле хуманијим друштвом.
У протеклим деценијама, захваљујући тим променама, он је са разлогом постао нови капитализам, социјалнији капитализам. Због тога се понекад употребљава израз социјални капитализам.
Међутим, сада без љутог противника у лицу социјализма, капитализам нема егзистенцијални подстицај да се мења, хуманизује, па чак ни да се развија.
Сам на терену на коме је до јуче ратовао, и победио, заслужује да се одмори.
Међутим, тај одмор дуго траје, капитализам се улењио. Одстуство противника успорава његов развој. Исти мач којим је одсекао главу свом противнику прети и њему.
Економска, социјална и културна деградација капитализма ће се одвијати споро и као сви империјални животи престаће да постоји због својих унутрашњих слабости а не због цивилизацијског конкурента. За сада и у најближој будућности он се није најавио.
10. Технолошки развој се креће у правцу све већег присуства вештачке интелигенције која треба да компензира недостатке човекове, однсоно биолошке. Човек већ сада користи разне имплантанте (у мозгу и у телу) и користиће их све више да би опстао у свету који се технолошки толико брзо и интезивно мења да његов аутентични биолошки састав са њим све теже кореспондира.
Вештачка интелигенција ће се развијати на рачун биолошке, али је у скорој будућности неће радикално довести у питање.